Photographies argentiques, impressions pigmentaires 60×75 cm sur photo rag 308 g. Série exposée dans le cadre de l’exposition « 12 mètres carrés » au centre d’Art Image/Imatge d’Orthez en juillet 2014.
Avec l’avènement d’une société de loisirs de masse, les espaces naturels ressemblent à une scène où se déploient des pratiques collectives ritualisées et codifiées. Certains lieux, qui ont été construits comme des espaces d’épanouissement au cours du siècle dernier, font aujourd’hui l’objet de comportements repérables, où l’usage social de la nature prend la forme d’un consumérisme sophistiqué, prétexte à des pratiques de distinction sociale. Ces usages révèlent des formes singulières d’utilisation collective de l’espace. Dans ces lieux, le «nous» émerge non de la volonté d’être ensemble, mais de la juxtaposition mécanique des individualités. Pourtant tous ces individus alimentent bel et bien une forme de vivre ensemble. Ils consomment l’environnement et le paysage sur un mode symbolique. Ils le mettent en scène comme un univers de projections mentales où prospèrent les notions de liberté, de partage, de réalisation individuelle, de spiritualité, de plaisir ou de contemplation… Les images de ce travail montrent comment ces pratiques donnent un statut à l’espace qui les reçoit, en y projetant les nouveaux attributs de la «nature», dans une entreprise de production de sens dont l’espace est le matériau. Si l’objet réel de ces photographies est bien le paysage, il s’agit du paysage intérieur fantasmé par ses usagers. La photographie capte et réifie cette vérité subjective projetée sur l’espace, elle révèle le caractère éthéré de ces paysages mentaux, oniriques et dépouillés.
G. Bonnel